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Tribune – Non, un Bilan Carbone® réalisé en quelques clics n’existe pas.

Depuis plusieurs mois, de nouvelles solutions logicielles de calcul et de réduction des émissions de gaz à effet de serre apparaissent sur le marché, preuve d’une meilleure sensibilisation des acteurs et nous en sommes ravis !

Toutefois, en promettant un bilan carbone en quelques clics, certaines font fi des principes fondamentaux de la méthode Bilan Carbone®, standard à l’international depuis 20 ans. Explications.

Le Bilan Carbone® : bien plus qu’une simple mesure de l’empreinte carbone d’une organisation

Revenons un peu en arrière. Créé en 2004 par l’ADEME, le Bilan Carbone® (BC®) est une méthodologie de quantification des émissions de GES pour les organisations et les territoires, pensée avant tout comme une démarche. Ayant vu le jour il y a près de 20 ans aux côtés du GHG Protocol, cette méthode de comptabilité fait aujourd’hui office de référence à l’échelle internationale.

Depuis 10 ans, l’équipe et les membres de l’Association Bilan Carbone (ABC) font vivre cette méthode exigeante et la mettent à disposition du plus grand nombre d’organisations. Ils animent une dynamique de stratégie et d’actions pour favoriser son accessibilité et la développent en prenant en compte l’évolution des pratiques et des textes réglementaires. Cela se traduit concrètement par : dispositif de formations, guides méthodologiques, mise à jour des outils, utilitaires et animation de la communauté… Chaque année, c’est environ 300 à 1000 organisations adhérentes et licenciées qui utilisent la méthode BC® et nous totalisons aujourd’hui plus de 15 000 personnes formées.

Ainsi, au vu de l’expertise de l’ABC et de sa grande communauté, nous souhaitons, via cette tribune, rappeler les principes fondamentaux de la méthode et le caractère indispensable de la montée en compétences des acteurs sur ces sujets. Il s’agit avant tout pour les structures de mettre en place une démarche d’amélioration continue, et non simplement de reporter leurs émissions. Cette démarche qualitative génère un coût parce qu’elle répond à une exigence.

Ces nouvelles solutions logicielles permettent de massifier le nombre d’organisations sensibilisées à une meilleure prise en compte des enjeux climat. Bon point certes, mais attention à celles qui promettent un résultat en quelques clics via un algorithme – le plus souvent opaque – : il ne pourra jamais prétendre remplacer une méthode complète, utilisée par des acteurs formés aux enjeux de la transition bas carbone et impliquant la sensibilisation des parties prenantes, en particulier lorsqu’il s’agit du top management d’une organisation.

Par cette tribune, loin de nous l’idée de porter un avis particulier sur telle ou telle solution. Nous tenons simplement à préciser quelques grands principes inhérents à notre méthodologie, forte de ses années d’expérience.

Le Bilan Carbone® avait 20 ans d’avance

Depuis 2004, de nombreuses versions du BC® ont été régulièrement mises à disposition, chacune d’entre elles permettant aux entreprises et aux territoires de disposer d’un outil pertinent et exigeant. En 2017, l’ABC a entamé un travail important de mise à jour de sa méthodologie. Après plusieurs mois de réflexions et de réunions du comité d’expertise, une version 8 de la méthodologie du Bilan Carbone® a vu le jour et s’est dotée d’un nouveau guide méthodologique. Les outils associés à la méthode ont également été mis à jour et une version logicielle a même fait son apparition en 2021.

Les 3 principes fondamentaux de la méthode Bilan Carbone® sont les suivants ;

1. Un cadre méthodologique et technique à respecter : la méthode du Bilan Carbone® étant une méthode d’évaluation des émissions de GES, il est indispensable de définir des règles de calculs communes et respectées par toutes les solutions.

Parmi les éléments indispensables, nous insisterons sur :

    • Le choix du périmètre et la nécessité de prendre en compte l’ensemble des émissions indirectes.
    • La séparation des émissions évitées : l’objectif même d’un Bilan Carbone® est de cartographier l’impact physique réel d’une activité ou d’un projet, de prioriser les postes d’émissions et de passer à l’action. Les émissions évitées sont donc à comptabiliser à part et ne peuvent en aucun cas être soustraites d’un profil d’émissions. Fuyez les solutions vous promettant un bilan carbone neutre ou ‘négatif’, cela n’existe pas.
    • La séparation des émissions compensées : de la même manière, la compensation ne peut être retranchée d’un profil d’émissions sous peine de disposer d’une vision partielle de la responsabilité d’une organisation en termes de réduction d’émissions. C’est d’autant plus important qu’il n’existe pas de définition consensuelle de la neutralité carbone actuellement.
    • La séparation des émissions séquestrées : la méthode le rappelle, les puits de carbone ne doivent pas être inclus dans le bilan carbone d’une organisation.

Ces choix méthodologiques sont aujourd’hui attendus par la norme ISO 14064-1:2018 et donc validés par l’ensemble des pairs à l’international.

2. Un accompagnement indispensable dans la mise en place de la démarche : réaliser un Bilan Carbone®, ce n’est pas juste réaliser un inventaire des émissions de GES. Comme pour toute stratégie, sa mise en place réussira si les parties prenantes sont sensibilisées, concernées et formées.

Il est donc essentiel de :

    • Former les utilisateurs des solutions proposées : Il s’agit d’une étape indispensable. De nombreux utilisateurs s’appuient sur des outils et solutions sans en apprécier l’intérêt ou les bénéfices et sans comprendre précisément les calculs, compréhension pourtant essentielle pour analyser et s’approprier les résultats et construire son plan d’actions.
    • Présenter les résultats et leurs analyses aux parties prenantes : tout au long de la mise en place de la démarche, des sessions de sensibilisation et d’avancement doivent être menées auprès des parties prenantes et notamment une fois les résultats obtenus. Cette présentation est essentielle à double titre : parce que ces parties prenantes ont été fournisseurs de données et parce qu’elles seront impliquées dans la mise en œuvre et la construction du plan d’actions.
    • La construction du programme d’actions : l’objectif d’un Bilan Carbone® n’étant pas de compter mais de réduire, il est important que la construction d’un plan d’actions compatible avec une trajectoire alignée avec la science soit associée à la démarche

3. Une transparence et une vérification des données primordiales : le Bilan Carbone® n’a cessé d’évoluer en toute transparence. Tout d’abord par son format ouvert, le tableur Excel permettant d’avoir accès facilement à l’ensemble des données et calculs utilisés et deuxièmement par la mise à disposition libre sur le site internet de l’ABC de la méthode et de ses annexes.

Les sources de données utilisées par ces solutions doivent également être transparentes. Au-delà même de l’utilisation par tous les outils de la Base Carbone® de l’Ademe ouverte et transparente, l’ensemble des données et hypothèses doivent être sourcées.

Depuis 2004, les mentalités ont évolué et d’autres méthodes de “référence” sont apparues, parmi lesquelles une norme ISO et la méthode réglementaire en France. Fait marquant : ces méthodes s’alignent au fil de leurs évolutions sur la méthodologie Bilan Carbone®, notamment en matière d’exigences.

Qu’il s’agisse de l’ISO, de la méthode réglementaire ou de la méthodologie Bilan Carbone®, toutes ces techniques nécessitent expertise et temps, pour l’organisation qui réalise son bilan ainsi que pour l’expert (si tel est le cas) qui l’accompagne.

[De ce fait, un Bilan Carbone® ne saurait être réalisé en quelques clics. Et les nombreuses solutions proposées vantant les mérites d’un ‘bilan rapidement accessible et peu onéreux’ questionnent quant au sérieux des calculs, à la fiabilité des outils, à leur mise en pratique et à leur réelle contribution pour un passage à l’action pertinent. Quant à celles qui orientent immédiatement vers l’achat de crédit carbone pour “compenser” ses émissions…

Depuis de nombreuses années, l’ABC suit le marché des inventaires et plus particulièrement du bilan carbone. Ces derniers ont un coût, certes, mais largement compensé par les bénéfices que fera l’organisation une fois son bilan réalisé et son plan d’actions défini. Et, au-delà même d’une réduction de sa facture énergétique, l’organisation en menant une démarche compatible avec la méthode du Bilan Carbone® pourra :

  • évaluer son risque climat
  • identifier de nouvelles opportunités
  • travailler à une vision long terme
  • réfléchir à un modèle économique compatible avec un monde bas carbone
  • mobiliser son équipe

Les bénéfices sont multiples…

Grâce à ses enquêtes annuelles, l’ABC estime à une dizaine de jours le temps nécessaire pour réaliser un Bilan Carbone®. Bien entendu, cette durée peut évoluer en fonction du type d’organisation.

Nous le répétons : Un bilan carbone réalisé en quelques clics n’existe pas. Un bilan carbone orientant uniquement l’organisation vers des actions de compensation, encore moins !

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Un mot sur l’auteur

Quentin Brache

Chargé de communication

Spécialiste en communication engagée ! Sujets de prédilection : #digital, #stratégie, #communication et #environnement

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